v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr Les hiboux Charles Baudelaire Cycle 3 * POÉSIE Sous les ifs noirs qui les abritent Les hiboux se tiennent rangés Ainsi que des dieux étrangers Dardant leur oeil rouge. Ils méditent. Sans remuer ils se tiendront Jusqu'à l'heure mélancolique Où, poussant le soleil oblique, Les ténèbres s'établiront. Leur attitude au sage enseigne Qu'il faut en ce monde qu'il craigne Le tumulte et le mouvement ; L'homme ivre d'une ombre qui passe Porte toujours le châtiment D'avoir voulu changer de place. Les Fleurs du Mal 1857 Charles Pierre Baudelaire (1821 – 1867) est un poète français. Né à Paris, il n’a qu’à peine connu son père, déjà âgé lors de sa naissance. Sa mère s’est remariée quelques années plus tard avec un militaire que Charles Baudelaire n’a cessé de haïr. Après des études relativement diffici- les et un voyage forcé aux Indes, il est revenu à Paris et a mené une vie dissolue. Un de ses recueils de poèmes, Les Fleurs du Mal, lui a d’ailleurs valu une condamnation par la justice pour “outrage aux bonnes moeurs”. Il est mort à Paris, en 1867, après avoir cumulé pendant un an les problèmes de santé. v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr L’albatros Charles Baudelaire Cycle 3 ** POÉSIE Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers. A peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à coté d'eux. Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid! L'un agace son bec avec un brûle-gueule, L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait! Le Poète est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l'archer; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l'empêchent de marcher. Les Fleurs du Mal 1857 Charles Pierre Baudelaire (1821 – 1867) est un poète français. Né à Paris, il n’a qu’à peine connu son père, déjà âgé lors de sa naissance. Sa mère s’est remariée quelques années plus tard avec un militaire que Charles Baudelaire n’a cessé de haïr. Après des études relativement diffici- les et un voyage forcé aux Indes, il est revenu à Paris et a mené une vie dissolue. Un de ses recueils de poèmes, Les Fleurs du Mal, lui a d’ailleurs valu une condamnation par la justice pour “outrage aux bonnes moeurs”. Il est mort à Paris, en 1867, après avoir cumulé pendant un an les problèmes de santé. v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr L’Ennemi Charles Baudelaire Cycle 3 *** POÉSIE Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage, Traversé çà et là par de brillants soleils ; Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage, Qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils. Voilà que j’ai touché l’automne des idées, Et qu’il faut employer la pelle et les râteaux Pour rassembler à neuf les terres inondées, Où l’eau creuse des trous grands comme des tombeaux. Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve Trouveront dans ce sol lavé comme une grève Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ? - Ô douleur ! ô douleur ! Le Temps mange la vie, Et l’obscur Ennemi qui nous ronge le coeur Du sang que nous perdons croît et se fortifie ! Les Fleurs du Mal 1857 Charles Pierre Baudelaire (1821 – 1867) est un poète français. Né à Paris, il n’a qu’à peine connu son père, déjà âgé lors de sa naissance. Sa mère s’est remariée quelques années plus tard avec un militaire que Charles Baudelaire n’a cessé de haïr. Après des études relativement diffici- les et un voyage forcé aux Indes, il est revenu à Paris et a mené une vie dissolue. Un de ses recueils de poèmes, Les Fleurs du Mal, lui a d’ailleurs valu une condamnation par la justice pour “outrage aux bonnes moeurs”. Il est mort à Paris, en 1867, après avoir cumulé pendant un an les problèmes de santé. v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr L’Horloge Charles Baudelaire Cycle 3 *** POÉSIE Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible, Dont le doigt nous menace et nous dit : « Souviens-toi ! Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi Se planteront bientôt comme dans une cible ; Le Plaisir vaporeux fuira vers l'horizon Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ; Chaque instant te dévore un morceau du délice À chaque homme accordé pour toute sa saison. Trois mille six cents fois par heure, la Seconde Chuchote : Souviens-toi ! - Rapide, avec sa voix D'insecte, Maintenant dit Je suis Autrefois, Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde ! Remember ! Souviens-toi ! Prodigue ! Esto memor ! (Mon gosier de métal parle toutes les langues) Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or ! Souviens-toi que le Temps est un joueur avide Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c'est la loi Le jour décroît ; la nuit augmente, souviens-toi ! Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide. Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard, Où l'auguste Vertu, ton épouse encor vierge, Où le Repentir même (oh ! la dernière auberge !), Où tout te dira Meurs, vieux lâche ! il est trop tard ! Les Fleurs du Mal 1857 Charles Pierre Baudelaire (1821 – 1867) est un poète français. Né à Paris, il n’a qu’à peine connu son père, déjà âgé lors de sa naissance. Sa mère s’est remariée quelques années plus tard avec un militaire que Charles Baudelaire n’a cessé de haïr. Après des études relativement diffici- les et un voyage forcé aux Indes, il est revenu à Paris et a mené une vie dissolue. Un de ses recueils de poèmes, Les Fleurs du Mal, lui a d’ailleurs valu une condamnation par la justice pour “outrage aux bonnes moeurs”. Il est mort à Paris, en 1867, après avoir cumulé pendant un an les problèmes de santé. v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr Cycle 3 * Chanson d’automne Guillaume Apollinaire POÉSIE Guillaume Apollinaire (1880 – 1918) est un écrivain français. Sa mère était une noble polonaise et son père un militaire italien. Ayant enchaîné de nombreuses activités (poète, journaliste, conférencier, critique d’art…) il s’est lié d’amitié avec des artistes importants du début du XXe siècle (Pablo Picasso, le Douanier Rousseau…) et a connu une vie amoureuse agitée. Blessé pendant la guerre en 1916, il est mort de la grippe espagnole en 1918. Dans le brouillard s'en vont un paysan cagneux Et son boeuf lentement dans le brouillard d'automne Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux Et s'en allant là-bas le paysan chantonne Une chanson d'amour et d'infidélité Qui parle d'une bague et d'un coeur que l'on brise Oh ! l'automne l'automne a fait mourir l'été Dans le brouillard s'en vont deux silhouettes grises Alcools 1913 v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr Cycle 3 ** Saltimbanques Guillaume Apollinaire POÉSIE Guillaume Apollinaire (1880 – 1918) est un écrivain français. Sa mère était une noble polonaise et son père un militaire italien. Ayant enchaîné de nombreuses activités (poète, journaliste, conférencier, critique d’art…) il s’est lié d’amitié avec des artistes importants du début du XXe siècle (Pablo Picasso, le Douanier Rousseau…) et a connu une vie amoureuse agitée. Blessé pendant la guerre en 1916, il est mort de la grippe espagnole en 1918. À Louis Dumur. Dans la plaine les baladins S'éloignent au long des jardins Devant l'huis des auberges grises Par les villages sans églises Et les enfants s'en vont devant Les autres suivent en rêvant Chaque arbre fruitier se résigne Quand de très loin ils lui font signe Ils ont des poids ronds ou carrés Des tambours des cerceaux dorés L'ours et le singe animaux sages Quêtent des sous sur leur passage Alcools 1913 v01 – Bruce Demaugé-Bost – http://bdemauge.free.fr Cycle 3 *** Le Pont Mirabeau Guillaume Apollinaire POÉSIE Guillaume Apollinaire (1880 – 1918) est un écrivain français. Sa mère était une noble polonaise et son père un militaire italien. Ayant enchaîné de nombreuses activités (poète, journaliste, conférencier, critique d’art…) il s’est lié d’amitié avec des artistes importants du début du XXe siècle (Pablo Picasso, le Douanier Rousseau…) et a connu une vie amoureuse agitée. Blessé pendant la guerre en 1916, il est mort de la grippe espagnole en 1918. Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il qu'il m'en souvienne La joie venait toujours après la peine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Les mains dans les mains restons face à face Tandis que sous Le pont de nos bras passe Des éternels regards l'onde si lasse Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure L'amour s'en va comme cette eau courante L'amour s'en va Comme la vie est lente Et comme l'Espérance est violente Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passé Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne l'heure Les jours s'en vont je demeure Alcools 1913